Reckless Sleepers a été créé en 1988, tirant son nom d'un tableau du surréaliste belge René Magritte. La compagnie ou le projet est né d'une multiplicité d'idées et de préoccupations, de mésaventures, d'accidents et d'opportunités. Il y avait, je m'en souviens, une énergie, une réaction à un théâtre digne de ce nom dans de grands lieux, trop grands pour que nos petits mots puissent y pénétrer. Je me souviens que j'étais furieux de regarder et d'écouter un style de présentation qui tentait un réalisme irréaliste, qui essayait de convaincre sans conviction, qui présentait de grands noms comme une grande attraction. C'est toujours la même chose, cela me donne toujours envie d'essayer et de tenter quelque chose d'autre, quelque chose d'autre que cette démesure. Les aspects positifs de cette négativité l'ont rapidement emporté sur les aspects négatifs, et c'est ainsi que, sans plan d'action ni idée de ce que Reckless Sleepers était censé faire, des projets ont commencé à voir le jour. Un petit ensemble de règles non écrites a commencé à prendre forme. Les idées sont devenues centrales, les projets ont été installés plutôt que présentés, les erreurs ont été acceptées, les idées ont eu une chance, les idées ont été poussées jusqu'à devenir inconfortables à faire, inconfortables à écouter, inconfortables à regarder. Les projets ne sont pas écrits au sens traditionnel du terme. Ils sont constitués de couches de fragments découpés et collés qui ont été élaborés devant un écran d'ordinateur, dans une boîte noire, dans le train du retour, au milieu de la nuit. Ils contiennent un ensemble de règles, un ordre social, une structure, un chaos très ordonné et, après un certain temps, quelques expériences et beaucoup d'échecs, un projet commence à prendre une forme, une identité propre. Je ne sais toujours pas ce que font les Reckless Sleepers, je n'arrive toujours pas à mettre le doigt dessus, alors ça reste immobile. Mole Wetherell